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TIROIR 39 PAQUET DEUXIEME

Papiers concernants les difficultés élevées :
1° sur le tribunal où doivent être portées de droit les causes entre l'Abbé et ses jurisdictionaires de Grion ;
2° sur le tribunal où doivent être portés les appels des sentences de Grion et Salaz ;
3° sur les mandats que les seigneurs gouverneurs d'Aigle peuvent faire publier à Grion [Gryon] sans requisitoriales ou avec requisitoriales de l'Abbé ;
4° sur le lieu où l'Abbé doit exercer sa jurisdiction.


TRIBUNAL COMPETANT POUR LES CAUSES ENTRE L'ABBE ET SES JURIDICTIONAIRES DE GRION [GRYON].

1° Feu M. l'abbé Franc [Joseph-Tobie Franc] ayant nommé en l683 un châtelain de Grion sans la présentation préalable du Conseil Général et lui ayant même donné le serment dans l'Abbaye, M. Favey, procureur fiscal de LL. EE., forma là-dessus autant de griefs et obtint du seigneur gouverneur Lombach un mandat pour citer ledit Abbé à comparoître le 25 février en Cour Gouvernale affin d'y répondre.

INFRACTION DE JURISDICTION. PROCES DE .L'ABBE FRANC CONTRE M. LE GOUVERNEUR LOMBACH.

L'Abbé répondit par son procureur M. Pittet, qu'il demandoit d'être renvoyé devant LL. EE., ses juges compétants etc. Il y eu diverses instances là-dessus, et la Chambre Gouvernale persista à lui refuser le renvoy demandé parce qu'il s'étoit soumis verbalement à ce tribunal, qu'il avoit accepté la 1ère citation et que c'étoit l'ordre et le devoir des seigneurs vassaux avant que d'importuner LL. EE. Enfin, ces difficultés furent portées devant LL. dites EE. qui condamnèrent l'Abbé sur la conduitte qu'il avoit tenu à l'égard de la nomination du nouveau châtelain, comme on va le voir, mais ne décidèrent point formellement, si le susdit renvoy étoit bien ou mal demendé par l'Abbé, se contentants de déclarer dans le dernier article de leur sentence du l0 mai 1683 que l'Abbé doit (quand à ses deux jurisdictions de Grion et Lavey) dépendre du gouverneur d'Aigle, et obéir à ses justes commendements, comme leurs autres vassaux. Il faut noter ici que les autres vassaux dans le gouvernement d'Aigle n'ont point droit de jurisdiction et bien moins droit de haute et omnimode jurisdiction : ainsi le cas est bien différend et cette dépendance ici exigée ne regarde pas le déclinatoire en question et qui paroît juste en lui-même, puisque vu le traitté de 1512 (cottés à l'art. Jurisdiction de Grion) et son droit de haute jurisdiction, il n' oblige de reconnoître d'autre tribunal supérieur que celui de LL. EE.

39/2/1

Voyés toute la suitte de cette affaire et la procédure avec ladite sentence souveraine accompagnée de son extrait en françois, ici sous le n°1 [39/2/1].

9 documents cotés :
CHA 39/2/1~01
CHA 39/2/1~02
CHA 39/2/1~03
CHA 39/2/1~04
CHA 39/2/1~05
CHA 39/2/1~06
CHA 39/2/1~07
CHA 39/2/1~08
CHA 39/2/1~09

 

Il est si vrai que la Chambre Gouvernale d'Aigle n'a point droit de 1ère instance sur les causes qui s'élèvent entre l'Abbé et ses jurisdictionaires, que ces sortes de causes depuis ladite affaire de l'an 1683 ont toujour été immédiatement portées devant LL. EE. comme celles de 1724 et 1732 sur le payement et remboursement de la grande taille, ainsi qu'on l'a vu ci-dessus ; celle de 1725 sur les plaintes de ceux de Grion contre l'abbé Charléti, comme on le verra ci-après à l'art. Etablissement des officiers n° 4 p. 57 [39/4/4], celle de 1732 contre le châtelain Jussier cy-après d'abord n°3 p. 49 et celle de 1764 sur la propriété des bois cy-après à l'art. qui en traittera p. 64. Aussi ladite chambre, si elle a jugé sur quelques-unes de ces causes en 1ère instance, elle ne l'a fait ou qu'en vertu des commissions spéciales qu'elle en a reçue de LL. EE. ce qui ne lui attribue aucun droit ordinaire, ou parce que l'Abbaye a bien voulu se soumettre en 1ère instance à ce tribunal comme en celle de 1726 touchant l'affranchissement prétendu de la grande taille (cy-dessus) qui ne consistoie d'ailleur qu'à vérifier ce qui avoit déjà été exposé à LL. EE. en 1724.

Vide ibid art. Grande taille de Grion p. 21.

Et effectivement les seigneurs Gouverneurs depuis 1683, malgré diverses infractions de jurisdiction, n'ont jamais prétendu avoir absolument droit de juger sur telles causes : ils ont même souvent supposé qu'ils ne l'avoient pas comme on le verra cy-après.

N. B. Ceux de Grion ne peuvent l'aider contre l'Abbé, sans s'être préalablement <page 703> addressé à lui pour tâcher de parvenir à quelque accord et cela à teneur de l'arrangement fait en 1765 cotté cy-après à l'article des officiants de l'Abbé p. 57, n°3 litt. [39/4/3].

TRIBUNAL COMPETANT DES APPELS DES SENTENCES PORTEES A GRION [GRYON] OU A SALAZ [SALA].

2° Il est certain que comme des jugemens rendus dans la justice inférieure de Grion, on ne peut appeller de droits que devant le tribunal de M. l'Abbé ou de sa chambre de Salaz, de même les appels des sentences de ce dernier tribunal doivent être portés immédiatement devant LL. EE. Cela conste clairement par la teneur du traitté passé en 1512 entre LL. dites EE. et l'abbé Jean d'Allinge [Jean Bernardi d'Allinges] ou cela est expressément déclaré.

Vide art. Jurisdiction rière Grion n°10.[38/1/10]

39/2/2

INFRACTION DE JURISDICTION. Il est vrai que M. le gouverneur Ryhyner semble par deux mandats du 29 mars et 17 novembre 1710 évoquer devant sa Chambre Gouvernale un appel d'une sentence de la justice de Grion [Gryon] portée contre Pierre Grept. Mais outre que c'étoit là des infractions de jurisdiction, comme il a paru le reconnoître lui-même, lorsque le 28 avril 1711, il a renvoyé lui-même par un nouveau mandat et du consentement de l'abbé Camanis cette même cause devant la Chambre des Suprêmes appellations allemandes de Berne ; il a réservé dans ces mandats les droits de l'Abbé, reconnu que cet appel devoit être porté devant la chambre de Salaz et ne vouloit l'évoquer devant la Chambre Gouvernale que parce que M. l'Abbé différoit trop de vuider lui-même cet appel à Salaz à cause de la difficulté qui s'élévoit entre lui Gouverneur et l'Abbé sur la nomination des assesseurs comme on le verra cy-après en consultant et confrontant les susdits mandats cottés ici n°2 [39/2/2] avec les lettres écrites pour lors entre eux et que l'on trouvera cottés plus bas à l'art. Etablissement des officiants n°2 p. 52 [39/3/2].

4 documents cotés :
CHA 39/2/2
CHA 39/2/2~01
CHA 39/2/2~02
CHA 39/2/2~03

 

MANDATS DES SEIGNEURS GOUVERNEURS TOUCHANT LE MILITAIRE ET LA RELIGION.

3° Quand à ce qui regarde les mandats que les seigneurs gouverneurs d'Aigle peuvent faire publier à Grion, il n'y a d'abord aucun doute qu'ils ne soient en droit d'y faire publier, sans la participation de l'Abbé tous les ordres, qui concernent purement le militaire, la religion, et les affaires consistoriales, ces matières étants uniquement de leur ressort, comme on l'a vu cy-dessus, p. 43.


TOUCHANT LES ORDONANCES SOUVERAINES SUR LE CIVIL, POLICE, ETC. EN GENERAL APRES QU'ELLES ONT ETE PUBLIEES EN CHAIRE.

En 2e lieu c'est un usage assez établi, que les seigneurs gouverneurs d'Aigle font aussi publier, de la même manière à Grion [Gryon] les ordonnances souveraines soit communes à tous leurs sujets, soit particulières aux gouvernement d'Aigle ou à la commune de Grion etc. général, quoi qu'elles concernent des choses différentes de celles du militaire et de la religion, telles que sont celles qui règlent l'administration de la justice, de la police et regardent la conservation des bois, biens, bestiaux etc., toute la différence qu'il y a entre les ordonances qui règlent le militaire et la religion, et celles dont on vient de parler, est qu'il n'est point nécessaire qu'on remette des copies des premières au châtelain mais bien des dernières, que ledit châtelain doit faire enregistrer, affin que lui, ses successeurs et le corps de justice en puissent avoir connoissance et veiller à leur exécution.

N. B. MM. les Abbés devroient aussi se procurer des copies de ces dernières ordonnances à mesure qu'elles parroissent, affin de s'y pouvoir conformer, et ne rien faire, ni ordonner de contraire. Il serait peut-être même convenable, qu'ils en eussent connoissance, avant qu'on les publiât de la part du seigneur Gouverneur et que les dits Abbés les fissent aussi publier de leur part en lieu de droit, surtout touchant la chasse, comme l'abbé Claret l'a pratiqué et sur lequel droit de chasse, le seigneur Gouverneur n'a rien à ordoner à Grion au moins de son chef.

Voyés ci-dessus p. 43 .[39/1/3]

<page 704>

TOUCHANT LES ORDRES SOUVERAINS VIS-A-VIS DES PARTICULIERS.

En 3e lieu quand aux exploits soit assignations que les seigneurs gouverneurs d'Aigle font faire par un officier aux personnnes particulières de Grion pour paroître devant eux en qualité de témoins ou de parties en des causes criminelles ou civiles de leur ressort et dont le jugement leur est spécialement renvoyé en 1ère instance par LL. EE. savoir, si dans les mandats qu'ils expédient pour tels exploits ou assignations ils doivent demender les requisitoriales du seigneur Abbé c'est ce dont doutoit en 1749 M. le gouverneur Ougspourguer dans la cause criminelle d'Antoine Bocherens dans sa lettre écrite à ce sujet à M. l'abbé Claret [Jean-Joseph Claret] dont on a parlé cy-dessus à l'art. des causes criminelles p. 40, [39/6/5].


REQUISITOIRES.

Quoiqu'il en soit de ces cas où les seigneurs gouverneurs agissent en vertu d'une commission spéciale de LL. EE., il paroît clair qu'ils ne peuvent sans infraction de la jurisdiction omnimode de l'Abbé sur Grion faire publier ou intimer dans son étendue de leur autorité ordinaire aucun mandat relatif à des causes même de leur ressort (à moins qu'elles ne regardent les affaires militaires ou consistoriales) sans demender les requisitoires de l'Abbé ou de ses juges. C'est cependant ce que l'on ne croit pas être sans exemple et c'est là sans doute de quoi se plaignoit l'abbé Zurthannen [FrançoisNicolas Zurtannen] en 1699 à LL. EE. comme on l'a vu ci-dessus à ladite année art. causes criminelles p. 37.


MANDATS DES SEIGNEURS GOUVERNEURS EMPORTANTS INFRACTIONS DE JURISDICTION.

En 5e lieu, à plus forte raison y auroit-il infraction manifeste de jurisdiction si un seigneur Gouverneur :

1) faisoit exploiter des mandats pour suivre à des appels des sentences de Grion ou du tribunal de Salaz devant la Chambre Gouvernale comme on l'a vu au n° précédant et tout récemment à la fin de janvier de cette anée 1766 ou le seigneur gouverneur Bondeli a fait citer M. Genet, châtelain de Salaz, devant la Chambre Gouvernale pour y répondre, savoir s'il s'opposoit ou non à l'appel que le sindic de Grion prétendoit avoir interjetté de la sentence qu'il avoit portée contre lui à Salaz le 24 décembre 1765. Ledit châtelain, ayant même été condamné aux frais le 29e janvier par contumace devant ladite Chambre Gouvernale.

Vide supra p. 41.

2) Si un seigneur gouverneur s'ingère d'ordonner juridiquement et par mandat aux châtelains ou justices de M. l'Abbé de porter quelque jugement ou faire d'autres fonctions juridiques dans leur ressort ou s'il s'attire à lui-même par mandat le jugement et la connoissance des faits arrivés rière ledit Grion, soit que ces faits regardent de personnes de Grion ou non.


PROCES AVEC LE CHATELAIN PIERRE JUSSIER SUR LE SUSPENS DE SON OFFICE.

Le 1er de ces cas est arrivé le 22e octobre 1731 où le seigneur gouverneur Matthey fit intimer au châtelain Jussier de Grion de faire rendre compte au lieutenant Martin de certains biens et effets qu'il devoit avoir appartenants à feu Pierre Mage que sa veuve réclamoit. Ledit châtelain obéit à ce mandat du gouverneur en convoquant le 25e octobre 1731 la justice en vertu dudit mandat, ce qui lui attira un mandat de suspense de sa charge le 4e février 1732 de la part de l'abbé Charléti [Louis-Nicolas Charléty] pour avoir ainsi reconnu dans son office un autre seigneur que ledit Abbé. Il s'éleva à l'occasion de cette suspense un procès entre ledit Abbé et le susdit châtellain.


SENTENCES GOUVERNALE ET SOUVERAINE.

LL. EE., ayant vu les griefs de l'Abbé, renvoyèrent le jugement de cette affaire à M. François Wuertemberguer pour lors gouverneur qui le 2d juillet 1732 condamna l'Abbé à réhabiliter tout simplement le châtelain. L'Abbé appella devant LL. EE. qui condamnèrent le 19 décembre, même année, le châtelain aux frais et à demender humblement à l'Abbé sa réhabilitation de sa charge comme en ayant été légitimement suspendue etc.

Le 2d des susdits cas est arrivé en juillet 1732 où ledit seigneur gouverneur Wurterberguer a réitéré trois fois un mandat contre Abraham Ravy en vertu duquel <page 705> il l'ajournoit devant lui pour cause de prétendues injures qu'il devoit avoir dit au châtelain Jussier à Grion.

39/2/3

Voyés ici sous le n°3 [39/2/3] lesdits mandats avec les papiers et sentences concernantes la susdite cause contre le châtelain Pierre Jussier.

24 documents cotés :
CHA 39/2/3~01
CHA 39/2/3~02
CHA 39/2/3~03
CHA 39/2/3~04
CHA 39/2/3~05
CHA 39/2/3~06
CHA 39/2/3~07
CHA 39/2/3~08
CHA 39/2/3~09
CHA 39/2/3~10
CHA 39/2/3~11
CHA 39/2/3~12
CHA 39/2/3~13
CHA 39/2/3~14
CHA 39/2/3~15
CHA 39/2/3~16
CHA 39/2/3~17
CHA 39/2/3~18
CHA 39/2/3~19
CHA 39/2/3~20
CHA 39/2/3~21
CHA 39/2/3~22
CHA 39/2/3~23
CHA 39/2/3~24


LIEU OU SE DOIT EXERCER LA JURISDICTION PAR LE CHATELAIN ET JUSTICE DE GRION.

4° Pour ce qui concerne le lieu où le seigneur Abbé, soit ses officians doivent exercer la justice, donner des serments etc. en ce qui regarde la jurisdiction de Grion, il est d'abord certain que le châtelain, ses assesseurs et l'officier de Grion composants avec le curial, la justice inférieure du lieu, soit réunis, soit séparement, ne peuvent en venir à aucun jugement, exploit ou acte juridique de leurs offices hors des limites de ladite jurisdiction. C'est la règle générale et on ne voit pas, que le contraire soit arrivé jusqu'ici ; et si quelques fois ledit châtelain ou même les justiciers de Grion ont assisté à des sentences criminelles à Salaz, c'est qu'ils y étoient requis par l'Abbé en qualité d'assesseurs de son juge, cela est arrivé notamment en 1713, p. 37, 1566 et l642, p. 35 [38/4/5 et 38/6/1]. II y a cependant apparence que le châtelain de Grion pourroit signer ou sceller des mandats hors de la jurisdiction, en cas de besoin.

PAR L'ABBE OU SES OFFICIANTS DE SALAZ [SALA].

Quand au Seigneur Abbé et à son juge, soit châtelain de Salaz, on a remarqué ci-devant p. 34 que du tems des ducs ou comtes de Savoie, ils entendoient juridiquement les parties de Grion et portoient leurs sentences tantôt à Salaz, tantôt à Grion, tantôt même à Saint-Maurice, etc., avant même l'année l683. Les Abbés assermentoient souvent leurs officiants à l'Abbaye, comme l'abbé Franc [Josph-Tobie Franc] le remontroit à LL. EE. dans la procédure cottée ci-dessus p. 47, N° 1. Mais l'abus de distraire ceux de Grion hors de leur jurisdiction pour les juger a été rigoureusement deffendu de la part de LL. EE. par le seigneur gouverneur Steurler en 1549 par sentence portée contre le châtelain de l'Abbé nommé de Jutigninge qui fut même condamné à la prison au château d'Aigle et à 10 florins d'amande pour avoir manqué en ce point.

Voyés une copie de cette sentence au livre de Berne p. 55. La même deffense a été renouvellée en 1683 contre l'abbé Franc par sentence de LL. EE., cottée ci-dessus p. 47 qui deffend aussi à l'Abbé d'asserementer ou faire asserementer leurs châtelains de Grion et de Lavey ailleur qu'à Grion ou à Lavey.

N. B. Il faut même les assermenter en présence de la justice lors de leur installation en vertu de l'arrangement de 1765 pp. 56 et 57.

Tout ce donc que l'Abbé ou ses officiants de Salaz peuvent faire hors de Salaz ou de la jurisdiction de Grion vis-à-vis des Grionois est de permettre et donner des mandats sous leurs sceaux ou signatures comme il a toujour été pratiqué.

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