TIROIR 58 PAQUET DEUXIÈME

Procès et difficultés touchant le prieuré de Semur

N. B. Pour mieux entendre les articles qui suivent, il faut lire avant toutes choses ce qui est rapporté cy-après, N° 14 [58/2/14]

La mort du prédit Jean Jossey, prieur de Semur, arrivée en 1620, servit de première époque aux difficultés qui se sont élevées au sujet dudit prieuré et qui l'ont enfin fait perdre à l'Abbaye, comme on va le voir peu à peu.

58/2/1
Procès pour Semur
Littera A : original
1621

Ledit Jossey [Jean Jossey] étant donc décédé, Henry de Maconin [Henri de Macognin de la Pierre], aumônier de l'Abbaye, eut ordre d'y aller occuper sa place comme il paroît dans sa lettre du 25 mars 1621, où il se signe prieur infortuné de Saint-Jean de Semur.

Cette lettre cottée ici, sub N° 1 : littera A [58/2/1A].

Littera B : copie

Mais Jean Bouchard, religieux dudit prieuré, avoit déjà obtenu alors de Grégoire 15 [Grégoire XV] des provisions en sa faveur dudit prieuré, dattée du 16 des kalendes de mars même année, dont la copie est cottée ici : littera B [58/2/1B].

Littera C : copie

Lesquelles furent exécutées et visées par l'official d'Autun : littera C [58/2/1C].

Litteræ D et E : originaux

Il faut remarquer que dans ces deux patentes, on supposoit expressément que le prieuré de Semur étoit à la vérité de la collation de l'abbé d'Agaune, mais qu'il étoit en même tems conventuel et nullement électif. Or, comme le défaut de l'une seule de ces prétendues qualités suffisoit pour rendre ladite provision de Bouchard [Jean Bouchard] obreptice et nulle, l'Abbaye auroit dû s'attacher à faire voir la fausseté de la première en prouvant, comme on a tâché de le faire dans la suitte par les titres cottés à l'article précédent, que ce prieuré n'étoit que purement claustral, au lieu de vouloir s'appuyer sur une certaine prétendue donation en faveur de la bâtisse de l'église dont il est parlé dans deux lettres cottées ici : litteræ D et E [58/2/1D & E], dans la première desquelles Henri de Maconin [Henri de Macognin de la Pierre] se plaint amèrement des maux qu'on lui a fait souffrir à Semur et en quelque sorte aussi de la négligence de l'Abbé à lui écrire.

Littera F : copie 1621

Ledit Henry ne manqua pas de s'opposer à ladite provision de Jean Bochard [Jean Bouchard] conjointement avec Guy Lemulier, André de Fontaine et Jaques, religieux dudit prieuré. La cause fut portée au Parlement de Dijon qui la renvoya au balliage de la montagne. Et cela dernier tribunal, après plusieurs débattues et production, adjugea enfin le possessoire dudit prieuré au susdit Bouchard, le 31 juillet 1621, comme il conste par la copie de sa sentence cottée ici : littera F [58/2/1F].

Littera G : original 1621

Le susdit Guy Lemulier, ayant aussi obtenu de son côté des provisions de Rome pour le même prieuré de Semur, vues et entérinées à l'officialité de Langres le 31 juillet, le curé de Semur, selon la commission qu'il en avoit, mit ledit Lemulier en possession dudit prieuré, nonobstant les oppositions formelles desdits de Maconin [Henri de Macognin de la Pierre], Bouchard [Jean Bouchard] et de Fontaine [André de Fontaine], le 10 aoust 1621. Selon l'acte original cotté : littera G [58/2/1G].

7 documents cotés:
CHA 58/2/1~A
CHA 58/2/1~B
CHA 58/2/1~C
CHA 58/2/1~D
CHA 58/2/1~E
CHA 58/2/1~F
CHA 58/2/1~G

 

58/2/2
Procès pour Semur
Copie
1628

On ne voit pas que ni ledit Maconin [Henri de Macognin de la Pierre] (qui se trouvoit déjà de retour à l'Abbaye au mois d'octobre de la susdite année 1621 : supra, littera E [58/2/1E]), ni les autres religieux de Semur ayent fait guère d'ultérieures démarches contre le susdit Bouchard qui, malgré même lesdites provisions du susdit Guy Lemulier, n'a pas laissé de jouir du prieuré de Semur jusqu'en 1628, en quelle année il le résigna entre les mains d'Urbain 8 [Urbain VIII] qui en pourvut sur le champ le prédit André de Fontaine comme d'un prieuré conventuel et non électif, le quatrième des nones de décembre 1628, ainsi qu'on le voit par les patentes qu'on lui accorda à ce sujet et dont la copie est cottée ici, N° 2.

N. B. On ne voit pas que l'Abbaye ait, au moins de longtems, réclamé contre les résignation et provision dont on vient de parler, quoique très préjudiciables à ses droits. Il y a apparence qu'on n'osoit le faire, crainte que la prétendue simonie, dont il est parlé plus bas, N° 14 [58/2/14], ne parût dans un trop grand jour.

1 document coté :
CHA 58/2/2

 

<page 856>

58/2/3
Procès pour Semur 1630 jusqu'en 1640

Les choses les plus notables qui se sont passées dans l'intervalle, entre 1630 et 1640, se réduisent aux suivantes :

1° Le susdit André de Fontaine, prieur, étoit fort mal vu audit prieuré par ses confrères, surtout en 1633 comme il conste par un recueil de plusieurs procès-verbaux, cotté ici N° 3 : littera A [58/2/3A], remplis d'injures, de paroles de désobéissance, de menaces et d'insultes qu'ils lui faisoient essuyer.

2° Il paroît, par deux lettres cottées B et C [58/2/3B & C], que les chanoines réguliers de la congrégation de Lorraine tâchoient sous mains dans ce tems-là déjà, d'introduire leur réforme dans ce prieuré et même dans l'Abbaye.

3° Mais la congrégation des chanoines réguliers de France ou de Sainte-Geneviève de Paris y fit plus de progrès, car le cardinal de la Rochefoucauld [François de la Rochefoucauld], étant chargé par le pape et par le roi de réformer et réunir tous les chanoines réguliers de France à ladite congrégation, ceux de Semur, sauf le prieur de Fontaine, résolurent sur la fin de cette année 1633 de l'ambrasser. Et ne pouvant induire ledit prieur à y consentir autrement, firent avec lui un traitté, le 16 novembre 1633, en vertu duquel le même prieur devoit conserver pendant toute sa vie son titre de prieur avec son logement, chauffage, cheval, etc. et 600 livres de rente par an et même sa supériorité sur les religieux jusqu'à l'introduction de la réforme, etc. Ce traitté, dans lequel on mit cependant la clause " sans préjudice des droits de l'abbé de Saint-Maurice ", et cotté ici littera D [58/2/3D], fut envoyé au mois de janvier suivant à l'Abbé et Chapitre de Saint-Maurice par ledit prieur qui, par sa lettre dont la copie est ici littera E [58/2/3E1 & 2], leur insinue la manière de s'y prendre pour empêcher à Paris la susdite réforme et union, et annuler même le traitté dont on vient de parler.

4° Enfin, l'abbé de Saint-Maurice reçut en 1639 une lettre d'un des religieux de Semur qui avoit déjà alors fait profession dans la congrégation de Sainte-Geneviève, par laquelle ledit religieux l'exhortoit vivement à favoriser cette congrégation et lui donnoit surtout avis de part ses supérieurs, que les Jésuites faisoient leurs efforts pour se rendre maîtres du prieuré de Senlis, à quoi le général de Sainte-Geneviève s'étoit déjà opposé : littera F [58/2/3F].

7 documents cotés:
CHA 58/2/3~A
CHA 58/2/3~B
CHA 58/2/3~C
CHA 58/2/3~D
CHA 58/2/3~E1
CHA 58/2/3~E2
CHA 58/2/3~F

 

1640, etc., jusqu'à la mort de l'abbé P.-M. Odet [Pierre-Maurice Odet]

On ne spécifiera pas ici en détail toutes les lettres et papiers concernants le prieuré de Semur pendant la tenue de l'abbé Pierre M. Odet [Pierre-Maurice Odet], n'étants plus à présent de grande conséquence. Qui en sera curieux pourra parcourir le livre de Senlis, Semur, etc. depuis le fol. 147 jusque vers la fin et feuilleter le paquet 4 de ce tiroir 58. On ne rapportera ici que les principaux faits qui se sont passés dans ce tems là.

Ledit abbé Odet, dès le commencement presque de son gouvernement, se vit assailli par deux puissants partis qui visoient chacun à s'emparer du prieuré de Semur. Les jésuites ayants gagné le prieur de Fontaine par belles promesses engagèrent en 1642 le prince de Condé et les magistrats de Semur à solliciter fortement ledit Abbé à consentir que ce prieuré leur fut cédé pour un collège dans cette ville. Voyés lettre d'un jésuite au dit prieur et celles du prince de Condé et du magistrat de Semur à l'Abbé, Libro Senlis, fol. 147 v. et 148. D'un autre côté, les chanoines réguliers de Sainte-Geneviève, en conséquence de la susdite commission donnée par le pape et par le roi au cardinal de la Rochefoucauld [François de la Rochefoucauld], obtinrent deffense du conseil du roi au prieur de Semur de recevoir à l'avenir aucun novice ou chanoine régulier pour desservir son prieuré, à moins qu'il ne fut de ladite congrégation de Sainte-Geneviève.

Ce qui devoit encore embarrasser ledit Abbé est que le prieur de Fontaine [André de Fontaine] panchoit pour l'un ou pour l'autre de ces partis jusques là même qu'à la fin, de consert avec ses religieux, il le sollicita fortement en 1644 et écrivit même à Monseigneur l'évêque de Sion pour la réunion dudit prieuré avec Sainte-Geneviève.

<page 857>

58/2/15
Procès pour Semur
Original et copies

Malgré tous les susdits assauts, l'abbé Odet [Pierre-Maurice Odet] demeura ferme. Il fit entendre en 1642 au dit prieur de Semur et à ses religieux, qu'il leur défendoit, sous peine d'excommunication, d'entendre à aucun traitté avec qui que ce fut au sujet dudit prieuré. Il éluda honnètement les sollicitations du prince de Condé et du magistrat de Semur en leur répondant qu'il étoit responsable au Saint Siège des droits et appartenans de son abbaye et qu'il ne pouvoit consentir à aucune dismembration dans son autorité. Il procura de plus au religieux qu'il députa à Paris à ce sujet, des lettres de recommandation très fortes de la part de l'évêque de Sion et de Leurs Excellences de Vallais, addressées au roi et au Parlement de Dijon et de la part du nonce de Lucerne qui se trouva alors en Vallais, pour le cardinal de la Rochefoucauld [François de la Rochefoucauld] et pour le nonce du pape à Paris. Ce qui, tout réuni ensemble, fit que les poursuites des jésuites furent absolument déconcertées et celles de la congrégation de Sainte Geneviève un peu assoupies en sorte même que les susdites lettres du prieuré et des religieux de Semur, écrites en 1644 à Monseigneur de Sion et à l'abbé Odet, ne leur en procurèrent de la part de ceux ci que des réponses pleines de fermeté et de reproches. On peut voir les copies ou originaux de toutes les susdites lettres, partie dans le livre de Senlis depuis le fol. 147 jusqu'à 156, et partie cottées ici n°15, outre d'autres de moindre conséquence dans le paquet quatrième de ce tiroir.

Voici ce qui se passa de plus considérable touchant ledit prieuré, depuis 1644 jusqu'en 1656 :

En 1648, l'Abbé et Chapitre, en étants requis, approuvèrent et confirmèrent l'acte de l'aliénation d'un bien dudit prieuré entre le prieur de Fontaine [André de Fontaine] et M. Jaques de Choiseuil, seigneur de Chevigny. Liber de Senlis, fol. 158.

Un des religieux de Semur, ayant ci-devant fait ériger un autel dans l'église dudit prieuré avec un pécul qu'il avoit formé des revenus du même prieuré, et ayant réservé qu'on chantât chaque jour devant ledit autel quelques antienes et prières sans laisser des fonds pour cela, lesdits Abbé et Chapitre, consultés là-dessus par le prieur de Fontaine, ordonnèrent que l'autel subsisteroit en mémoire de ladite restitution et qu'on y célébreroit quatre messes au quatre tems de chaque année pour les défunts bienfaiteurs du prieuré et de l'Abbaye, cassant au reste toutes les autres clauses de ladite fondation comme faite avec un argent amassé contre les règles de la profession religieuse. Liber de Senlis, fol. 159.

Le prieur de Fontaine avoit représenté en 1647 à l'Abbé que, n'ayant pas des sujets pour faire le service de son prieuré et que n'en pouvant espérer dudit Abbé, vu l'accident fatal causé par un crime inouï et qui lui en avoit enlevé une partie, ledit Abbé ayant failli d'y périr lui-même (on ne sait quel accident c'étoit), il croyoit que le plus court chemin pour réformer son prieuré et pour le service de l'Abbaye même, étoit d'avoir recours aux chanoines réguliers de France, ou surtout à ceux de Lorraine comme portants presque le même habit. Mais ledit Abbé, craignant sans doute toujour les desseins dudit prieur, ne voulut point entrer dans ce projet. Ainsi il commença, en cette année 1648, à lui procurer lui-même quelques religieux et entre autres Antoine Berodi, prieur, avec pouvoir de vicaire général, Jean Antoine Odet, Matthieu Catellani, Simon Dorrey, Pierre Greylor, etc. et surtout Augustin Colapot, aussi avec pouvoir de vicaire général en 1650, mais que ledit prieur ne voulut reconnoître et qu'il fit même emprisonner sous prétexte de sa mauvaise vie, mais plutôt peut-être parce qu'il ne vouloit lui-même reconnoître aucun supérieur comme étant soutenu ouvertement par le puissant crédit de M. Brulart, premier président du Parlement de Dijon; ce qui faisoit que l'abbé Odet [Pierre-Maurice Odet] même étoit obligé de le ménager dans ses lettres, quoiqu'il n'ignorât pas ses mauvaises dispositions contre son autorité dans ledit prieuré.

En 1653, l'Abbé consentit à ce que ledit prieur reçût audit prieuré pour novices, le neveux dudit président Brulart et Jean Burnet. Liber de Senlis, fol. 163. On peut voir en confirmation des choses dont on vient de parler, outre les endroits cités du livre de Senlis et Semur, plusieurs lettres et papiers concernants ce tems ici et contenus dans ledit paquet quatre du Tiroir 58.

6 documents cotés:
CHA 58/2/15~01
CHA 58/2/15~02
CHA 58/2/15~03
CHA 58/2/15~04
CHA 58/2/15~05
CHA 58/2/15~06

 

<page 858>

58/2/4
Procès pour Semur
Original
1657

En cette année, le 13 des kalendes de mars, en conséquence de la résignation du prieuré de Semur faite en cour de Rome par le prieur de Fontaine [André de Fontaine], Roger Brulard, frère du premier président du Parlement de Dijon, fut pourvu par le pape Alexandre 7 [Alexandre VII] dudit prieuré, à condition de faire profession de l'ordre de chanoine régulier et de recevoir les ordres, etc.

1 document coté :
CHA 58/2/4

 

58/2/5
Procès pour Semur
Original
1657

L'abbé Odet [Pierre-Maurice Odet] étant mort le 9 aoust de cette année et l'élection de Jean Jost Quartery [Jean-Jodoc Quartéry] s'étant faite trois jours après, savoir le 12, ce dernier envoya dès le mois de septembre Simon Dorrey, prieur claustral à Semur, avec une patente de vicaire général pour visiter les prieurés de Senlis et Semur. Mais il y a apparence qu'il n'osa pas la montrer puisque ledit prieur de Fontaine [André de Fontaine] le renvoya à l'Abbaye dès le mois d'octobre avec le susdit Roger Brulard et Guy Forestier pour les présenter à l'Abbé et Chapitre, pour faire leur noviciat à l'Abbaye. A quoi ledit prieur et ses religieux, et même le premier président Brulard, prioient qu'ils fussent admis. Mais ledit Abbé renvoya de son côté, soit M. Dorrey, soit les deux postulants audit prieur de Semur avec permission de leur donner l'habit et de leur faire faire leur noviciat dans son prieuré, lui promettant même de lui permettre ensuitte de passer plus loin, s'il les trouvoit capables. Tout ceci consté par les papiers et lettres cottées ici, N° 5.

6 documents cotés:
CHA 58/2/5~01
CHA 58/2/5~02
CHA 58/2/5~03
CHA 58/2/5~04
CHA 58/2/5~05
CHA 58/2/5~06

 

58/2/6
Procès pour Semur
Copie et original
1658

Les deux susdits candidats Brulard et Forestier ayant achevé leur noviciat dans leur prieuré de Semur, ils furent reçus par ledit prieur de Fontaine [André de Fontaine], du consentement de ses deux religieux Simon Dorrey et Barthélemy Champrond, le 23 novembre 1658 et firent profession entre ses mains le 26 novembre suivant, sans que ni dans l'un, ni dans l'autre de ces actes il soit fait aucune mention que ledit prieur ait eu aucun consentement de l'abbé de Saint-Maurice pour recevoir leurs professions. Les copies légales de ces deux actes cottées ici, N° 6.

1659

On y joint une lettre dudit prieur du 25 mars 1659 par laquelle il marque à l'abbé Jost [Jean-Jodoc Quartéry] qu'il a reçu la profession des deux susdits novices, qu'il lui envoye Forestier pour le former au chant et aux cérémonies en attendant qu'il aille commencer ses études sous les Jésuites à Dôle, pendant qu'il envoye Brulard étudier à Nevers sous les pères de Sainte-Geneviève et lui donne enfin, au surplus, avis qu'il a résigné son prieuré en cour de Rome audit Brulard, tâchant de lui prouver que c'est pour le bien du prieuré.

3 documents cotés:
CHA 58/2/6~01
CHA 58/2/6~02
CHA 58/2/6~03

 

58/2/7
Procès pour Semur
Copie légale
1659 et 1660

Aussitôt que ledit abbé Quartéry [Jean-Jodoc Quartéry] eut reçu la lettre dont on vient de parler, il consulta le nonce Frédéric Borromé [Frederico Borromeo], savoir si ladite profession, surtout dudit Forestier reçue sans sa participation, étoit valide. La raison d'en douter étoit d'un côté que les abbés avoient toujour été jusqu'en 1620 en paisible possession de conférer seuls, sans résignation, le prieuré de Semur et de jouir du droit de recevoir à profession les religieux dudit prieuré, en sorte que si les prieurs dudit prieuré en avoient quelques fois reçu jusqu'alors, ce n'avoit été qu'après en avoir reçu une permission expresse desdits abbés. D'autre part, le prieur moderne de Semur prétendoit que son prédécesseur, ayant été pourvu par le pape en 1621 parce que l'Abbé étoit tombé alors dans une espèce de simonie avec un autre qu'il avoit pourvu en 1620 (on verra ci-après N° 14 [58/2/14] de quoi il s'agissoit) et ayant reçu quatre sujets à profession sans consulter l'Abbé, et que lui-même prieur moderne ayant été pourvu de même par le pape en 1628, en conséquence de la résignation de son prédécesseur avec la clause " cum plenaria jurisdictione in spiritualibus et temporalibus ", il prétendoit, dis-je, être en droit de recevoir des professions sans l'autorité des abbés de Saint-Maurice. D'autant surtout qu'ils ne s'étoient pas opposés aux dites provisions. Le susdit nonce, ainsi consulté, décida le 30 may que ladite profession étoit nulle. Sur quoi le prédit Abbé, à la requête dudit Forestier, déclara aussi nulle sa dite profession et deffendit par sa sentence du 29 septembre même année au prieur de Semur, sous peine de suspense, de molester ledit Forestier à raison de ladite profession. Ledit Forestier n'en demeura pas là. Il consulta encore sur ce sujet six docteurs de Sorbonne qui opinèrent pareillement que la prétendue <page 859> simonie de l'Abbé en 1620, ni la possession d'un prieur titulaire depuis dite année, etc. ne pouvoient préjudicier aux anciens droits et à l'ancienne possession des abbés, et qu'ainsi la profession dont il étoit question étoit nulle, etc. Cette consulte est du 3 février 1660, dont la copie légale avec celle de ladite sentence de l'Abbé, qui rappelle la déclaration du nonce, est cottée ici, N° 7.

N. B. Selon les pièces de procès cottées ci-après, N° 11 [58/2/11], ledit Forestier, en conséquence des actes que l'on vient de citer, quitta l'habit et contracta publiquement mariage au su du prieur de Fontaine, sans que celui-ci y ait rien opposé.

3 documents cotés:
CHA 58/2/7~01
CHA 58/2/7~02
CHA 58/2/7~03

 

58/2/8
Procès pour Semur
Original
1664

En cette année, le 16 février, l'abbé Jost [Jean-Jodoc Quartéry] confère le prieuré de Semur à son chanoine Simon Dorrey [Simon Dorey] comme étant vacant, tant par l'incapacité à cause de la nullité de profession, etc. que par la résignation - Liber de Senlis, fol. 171 - faite le même jour de la part de Roger Brulart [Roger Brulard de Mussey], qui en avoit été pourvu par le pape sur la résignation du prieur de Fontaine [André de Fontaine].

N. B. On verra cy après, N° 14 [58/2/14], que ledit Brulard l'a aussi résigné audit de Fontaine, qui en fut alors environ pourvu pour la seconde fois.

Le même jour, ledit Abbé établit un procureur dont le nom est en blanc dans l'acte pour soutenir, en cas qu'il fût attaqué, son droit de recevoir seul des professions de religieux de l'Abbaye et du prieuré de Semur, et cela à l'occasion de la sentence par laquelle il avoit annullé les professions de Brulard et Forestier. Deux actes originaux qu'on ne croit pas avoir été employés.

On y ajoute, sous le même n°8, une lettre du prieur de Fontaine du 22 aoust dans laquelle il se plaint audit Abbé contre Simon Dorrey [Simon Dorey] lui donne avis que l'affaire de la profession de Brulard et Forestier est remise par le pape devant le tribunal de l'évêque, et lui conseille enfin de céder le prieuré de Semur à la congrégation de Sainte-Geneviève, moyenant une bonne somme, lui protestant qu'autrement il résignera ledit prieuré à l'un de ses parents.

N. B. On a plusieurs lettres semblables que l'on passe ici sous silence et qui se trouveront dans le paquet quatrième. Elles sont toutes relatives, ou au dessein que le prieur de Fontaine avoit de livrer insensiblement son prieuré entre les mains de MM. de Sainte-Geneviève, ou à des obédiences de religieux pour aller déservir ledit prieuré ou en revenir.

3 documents cotés:
CHA 58/2/8~01
CHA 58/2/8~02
CHA 58/2/8~03

 

58/2/9
Procès pour Semur
Copie
1670

Roger de Brulard, autrement appellé alors M. de Mussey [Roger Brulard de Mussey], ayant été condamné après plusieurs procédures le 5 décembre 1669 par sentence de l'official de la métropolitaine de Lion [Lyon] à rentrer dans la maison de sa profession pour y vivre sous l'obéissance de son supérieur, fit consulter deux docteurs de Paris, savoir s'il n'y avoit pas lieu à appel comme d'abus contre cette sentence devant le Parlement de Paris, et si l'intervention de l'abbé de Saint-Maurice n'y est pas nécessaire. Les deux docteurs répondirent affirmativement sur toutes les deux questions. Les faits qui concernoient les circonstances de la profession prétendue de M. Mussey sont bien détaillés dans cette consulte et il paroit que lesdits docteurs raisonnent fort solidement dans leur résultat pour prouver que la profession en question étoit nulle, non seulement par défaut de consentement à cause de la violence qui pouvoit y être intervenue, mais surtout à cause du défaut de légitime autorité dans le prieur de Fontaine pour la recevoir. Ce qui la rendoit nulle en elle-même et dans son principe, indépendement de toute réclamation, etc. Copie cottée ici n°9.

1 document coté :
CHA 58/2/9

 

58/2/10
Procès pour Semur
1671

Ce fut apparemment cette consulte favorable qui engagea l'abbé Franc [Joseph-Tobie Franc], qui avoit succédé à l'abbé Jost Quartery [Jean-Jodoc Quartéry] en 1670, à intervenir en cette année 1671 au procès de M. de Mussey [Roger Brulard de Mussey] devant le Parlement de Paris, sans pouvoir en être détourné par un de ses amis de Sainte-Geneviève qui, en lui donnant avis par sa lettre du 29 mars de cette année de la résignation du prieur de Fontaine en faveur du père Courtenin de la même congrégation, lui marque que son intervention ne serviroit de rien, vu que le prieur de Fontaine avoit été prieur en titre pourvu par un autre que par l'Abbé, et néanmoins reconnu par lui en cette qualité. L'abbé Franc donna donc procure, le 30 octobre, au prieur Dorrey [Simon Dorey] pour intervenir en son nom audit procès et y soutenir son droit de recevoir seul les professions, même pour le prieuré de Semur, etc.

La copie de cette procure et ladite lettre cottées ici, N° 10.

3 documents cotés:
CHA 58/2/10~01
CHA 58/2/10~02
CHA 58/2/10~03

 

58/2/11
Procès pour Semur
Copies
1672

Simon Dorrey [Simon Dorey] arrivé à Paris, à peine eut-il le tems de faire mettre par écrit les raisons de l'Abbaye avant que le Parlement prononçât sur cette fameuse cause. On cotte ici :

<page 860>

1° le plaidoyer qui fut prononcé dans la dernière audience en faveur de ladite Abbaye ;

2° un factum imprimé assés étendu en faveur de Roger Brulard ;

3° un autre factum imprimé pour l'Abbaye (Liber de Senlis, avant le fol. 88).

Ces trois pièces contiennent quelques faits dont on n'a point parlé ci-devant, parce qu'apparement les actes en ont été égarées et sont d'ailleur très solides et très pressentes contre la conventualité du prieuré de Semur. Il n'y a qu'une objection, mais principale, sur laquelle elles ne répondent presque rien. C'est celle tirée des provisions de Rome en tant que les abbés ne s'y sont jamais opposé, et les ont même en quelque sorte approuvées en reconnoissant pour vrais prieurs ceux qui les avoient reçues, et les nommant même quelques fois prieurs titulaires.

N. B. On avance hardiment et avec assurance dans ledit plaidoyer que l'original de la bulle du pape Adrien [Adrien Ier] donnée du tems de Charles Magne [Charlemagne] se trouve dans les archives du prieuré de Semur où elle avoit été compulsée.

N. B. Item que pour l'intelligence de l'arrêt suivant, il faut remarquer qu'à teneur dudit factum, l'avocat de Roger Brulard dans cette cause étoit M. Pageau, celui de Courtenin, au lieu de Fontaine, M. Lordelot, celui de M. le premier président de Dijon M. Novette et celui de l'abbé d'Agaune M. Blondeau.

2 documents cotés:
CHA 58/2/11~01
CHA 58/2/11~02

 

58/2/12
Procès pour Semur
Original et copie
3 mars 1672

Arrêt du Parlement de Paris qui maintient " la partie de Lordelot au droit et en la possession de recevoir des religieux à l'habit et à la profession dans le prieuré de Semur, sans préjudice du droit de supériorité et de visite de la partie de Blondeau, qu'il pourra exercer comme supérieur majeur selon les loix du Royaume, et en conséquence ordonne que la partie de Pageau sera tenue rentrer incessament dans le monastère de Semur, lieu de sa profession ", etc.

Arrêt imprimé, signé, avec copie.

2 documents cotés:
CHA 58/2/12~01
CHA 58/2/12~02

 

58/2/13
Procès pour Semur
Original
1673 et 74

Le roi, ayant de sa pleine autorité établi le 27 novembre 1673 les religieux de Sainte-Geneviève au dit prieuré de Semur, l'abbé Franc [Joseph-Tobie Franc] envoya aussitôt en cour son chanoine Simon Dorrey [Simon Dorey] avec des lettres de recommendations de Leurs Excellences de Vallais (celle-ci est cottée ici) de Fribourg, de Berne et même de l'ambassadeur de Soleure, et fit intimer le 23 février 1674 un ordre de sa part à Courtenin, prieur de Semur, dattée du 18 janvier, pour qu'il eût à porter l'habit religieux, comme on a coutume de le porter à l'Abbaye, et à renvoyer les religieux de Sainte-Geneviève qu'il avoit fait venir au dit prieuré, se faisant aider par des religieux de l'Abbaye ou de la congrégation du Sauveur et cela en vertu même de l'arrêt susdit du Parlement de Paris, contre lequel cependant il se réservoit le droit de se pourvoir en tems et lieu. Toutes ces démarches se firent alors dans le dessein de prier Sa Majesté de retenir la connoissance de cette affaire au sujet des droits de l'Abbaye sur le prieuré de Semur, lésés par le susdit arrêt, à sa propre personne. Mais on n'a rien pu obtenir et on n'eut point d'autre réponse, sinon qu'on pourroit se pourvoir par devant les juges ordinaires pour nous être fait droit. On cotte ici une copie de la susdite lettre de recommendation de Leurs Excellences de Vallais avec le susdit mandat de l'Abbé. Le reste de ce qu'on vient d'avancer ici conste par le N° qui suit.

2 documents cotés:
CHA 58/2/13~01
CHA 58/2/13~02

 

58/2/14
Procès pour Semur
Copies
1674

L'Abbaye, se voyant réduite en cet état au sujet du prieuré de Semur, addressa à Leurs Excellences de Vallais un mémoire où, après leur avoir exposé succintement ce qui s'étoit passé depuis surtout 1620, elle les prie de lui signifier ce qu'elle a à faire dans les circonstances présentes. Voici en quels termes ce mémoire, dressé par le prieur Dorrey [Simon Dorey], ou au moins écrit de sa main, exprime le fait qui a donné occasion aux provisions apostoliques depuis 1620 et par conséquent à la perte de ce prieuré.

" Elle (l'Abbaye) a joui paisiblement de ces droits ( de posséder ce prieuré comme un membre de la maison, d'y établir seule tous les prieurs, d'y recevoir les religieux à l'habit et profession) jusqu'en 1620. Que le feu révérendissime seigneur abbé George Quartéry [Jean-Jodoc Quartéry] ayant conféré ledit prieuré à un nommé Guy Lemulier au préjudice de la parole qu'il en avoit donné un an <page 861> auparavant au sieur de Fontaine [André de Fontaine] encore vivant, celui-ci, pour s'en venger, fit arrêter auprès de Bellegarde par les archers de Dijon ledit seigneur Abbé, sous prétexte qu'il emportoit hors du royaume une somme de 3 000 livres tournoises que les parens dudit Guy Lemulier avoient donné par aumône pour la fabrique de l'église de Saint-Maurice et en contemplation de ce qu'il avoit conféré ledit prieuré de Semur à leur parent. Ce fut la déclaration ingénue, pour ne pas dire indiscrète, que fit ledit seigneur Abbé, dont le prévôt de Dijon, ayant dressé procès verbal, on jugea qu'on pouvoit aisément faire passer cette collation pour simoniaque et partant, le bénéfice être impétrable en cour de Rome. Mais parce que ledit de Fontaine, étant tombé dans le même inconvénient par l'obligation ou cédule qu'il avoit fait un an auparavant audit seigneur Abbé de lui payer réellement la même somme de 3 000 livres lorsqu'il lui conféreroit ledit prieuré, il se servit d'un nommé Bouchard, au nom duquel ayant fait expédier à Rome des provisions dudit prieuré. Enfin, après avoir plaidé presqu'une année, par sentence du balliage de Chatillon, les bulles dudit Bouchard furent déclarées bien obtenues, le prieuré lui fut adjugé, et par conséquent reconnu pour titulaire et conventuel comme il étoit qualifié dans lesdites bulles. En 1628, ledit Bouchard le résigna en cour de Rome en faveur dudit Fontaine, lequel en 1657 le résigna aussi à M. Brulart de Mussey.[Roger Brulard de Mussey] En 1663, celui-ci le remit au même de Fontaine qui l'a résigné au père Claude Courtenin, religieux de Sainte-Geneviève, l'an 1671, sans aucune opposition de la part de l'Abbaye à toutes ces résignations. "

N. B. Outre la crainte de mettre trop au jour lesdites prétendues simonies, il y a apparence que le grand crédit des présidents Brularts, protecteurs déclarés du prieur de Fontaine, a beaucoup empêché l'Abbaye de réclamer à tems contre lesdites provisions.

Quoi qu'il en soit l'Abbaye, après avoir ensuitte rappellé dans son mémoire à Leurs dites Excellences les sentences de l'officialité de Lion [Lyon] et du Parlement de Paris, ainsi que le refus fait par le roi de prendre lui-même connoissance de cette affaire, et l'introduction des chanoines de Sainte-Geneviève dans le prieuré de Semur comme on l'a vu au n° précédent [58/2/13]. Elle leur présente qu'il n'y a point d'espérance de pouvoir revenir de la sentence du Parlement de Paris ; qu'il ne seroit à la vérité pas impossible de faire révoquer les patentes du roi pour l'introduction des religieux de Sainte-Geneviève dans ledit prieuré, mais que cela seroit très difficile, vu le crédit de ladite congrégation, etc. Et que d'ailleur cela n'avanceroit guère l'Abbaye puisqu'elle n'y conserveroit, cela même supposé, qu'un simple droit de collation et de visite sujet à mille difficultés. Et qu'ainsi, doutant si dans cette extrémité le meilleur parti pour elle ne seroit pas de tâcher de s'accommoder avec la congrégation de Sainte-Geneviève en lui cédant ses droits de visite et de collation et prenant d'elle tout le dédomagement qu'on en pourroit tirer, elle supplioit Leurs Excellences dans une affaire de cette importance dans laquelle elle ne vouloit rien entreprendre sans leur sage avis et conseil, de lui vouloir déclarer là-dessus leur intention.

Il y a apparence que Leurs dites Excellences n'ont pas trouvé mauvais qu'on chercha à tirer quelque parti de MM. de Sainte-Geneviève puisque la chose fut conclue dès l'année suivante, ainsi qu'on va le voir à l'article suivant.

Voir aussi Charléty, p. 624

2 documents cotés:
CHA 58/2/14~01
CHA 58/2/14~02