Florence 21 mai 50
Monsieur le Grand Chancelier,
Je reçois la lettre que vous me faites l’honneur de m’écrire pour m’annoncer que S.A.I.et R. le Grand-Duc de Toscane a daigné m’admettre dans l’Ordre de Saint Joseph.
Je suis extrêmement sensible à cet honneur mais je dois faire observer à Votre Excellence qu’il y a sans doute erreur et que les gracieuses intentions de S.A.I.et R. n’auront pas été exactement suivies. Pour mes prédécesseurs à la Cour de Toscane et toutes les personnes dans une position semblable à la mienne qui ont été appelées à faire partie de l’Ordre de Saint Joseph, ont toujours été décorées de la Grand-Croix de l’Ordre ; Monsieur de Perrazzi Ministre résident de Toscane à Paris après avoir remis ses lettres de rappel a été nommé par le Président de la République Française Grand Officier de la Légion d’honneur. Une erreur seule a pu me faire nommer Commandeur.
Il m’est impossible de douter de la bienveillance du Grand-Duc à mon égard conservant précieusement par devers moi plus de dix lettres écrites de Gaëte par le Chevalier de Bithausen ( ?) secrétaire intime de S.A.I. et R. dans lesquelles par ordre de son Auguste Maître Mr de Bithausen ( ?) m’exprime ce qu’il veut bien appeler les sentiments de reconnaissance du Grand-Duc pour des services que des circonstances tout à fait exceptionnelles m’avaient permis de lui rendre. J’aurais pu craindre d’avoir perdu cette haute bienveillance si le Gouverneur Grand-Ducal n’avait saisi toutes les occasions, et même de très récentes, pour rappeler avec insistance les bons offices qu’à plusieurs reprises, La France avait rendus à la Toscane par mon intermédiaire et auxquels on voulait bien m’attribuer une part que je ne mérite peut-être pas.
En tout cas s’il était vrai que j’eusse été assez heureux pour être de quelque utilité au Grand-Duc et à la Toscane pendant la mission qui m’a été confiée auprès de S.A.I.et R. par le Gouvernement de la République Française, j’en ai été grandement récompensé par l’insigne honneur dont je conserverai toujours le souvenir que le Grand-Duc et la famille royale ont daigné faire à la Légation de France en honorant de leur présence le bal donné à l’occasion du mariage de l’Archiduchesse Isabelle et la haute faveur dont j’ai été l’objet dans cette occasion est pour moi une nouvelle preuve que mon admission dans l’Ordre de Saint Joseph dans une classe au-dessous de celle dans laquelle ont toujours été admis mes pareils ne saurait être que le résultat d’une erreur. Agréez, Monsieur le Grand Chancelier, l’assurance de ma haute considération.