Paris, ce 4 mai 1869

 

Monsieur le Comte,

J'ai vingt ans, j'ai fait des études convenables ; comme tout le monde je suis bachelier et fait mon droit, interrompu il y a un an pour fonder et administrer la Nouvelle Revue de Paris tombée sous un coup imprévu.

Voilà ce que vous apprendriez sans doute, si je faisais solliciter par quelques personnes de votre entourage l'insigne honneur que je prends la liberté de demander moi-même tout indigne que j'en sois; mais voici, Monsieur le comte, ce que l'on ne pourrait vous dire et qui est cependant le seul titre dont je veuille être paré à vos yeux. J'ai à mettre au service de votre personne et de votre fortune un dévouement absolu, parce que je ne dépends de rien ni de personne, désintéressé, parce que je n'ai besoin de personne ni de rien, la volonté de faire ce que je sais, d'apprendre ce que je ne sais pas, l'ambition de justifier votre confiance, si vous me l'accordez de conquérir votre estime, si j'obtiens votre confiance. Vous me pardonnerez, j'espère, Monsieur le Comte, en faveur de cette déclaration de ne pas avoir voulu d'autre interprète de ma pensée que moi-même, et donc, sans aucun droit, m'offrir comme votre secrétaire particulier.

Agréez, Monsieur le Comte, avec le regret d'avoir dérobé quelques-uns de vos instants à des loisirs précieux pour tous, l'expression de mon dévouement le plus respectueux votre obéissant.