TABLE RONDE 1er et 2 juin 2007

BESANÇON

Autour de saint Maurice :
Politique, société et construction identitaire.

 

Louis HOLTZ :

La tradition manuscrite de la Passion d'Eucher



Dans l'histoire de cette tradition le ms Paris BnF 9550 (C'est le ms A1 de Krusch, que nous désignerons par P), daté par E. A. Lowe du VI e /VIIe s., occupe une place singulière. Il en est le plus ancien témoin, mais, fait unique, s'ouvre sur les deux traités herméneutiques de l'auteur, les Formulae spiritalis intellegentiae et les Instructiones diffusés à travers toutes les régions de l'Occident dès le haut Moyen âge et dont Lowe recense une douzaine de mss antérieurs à l'an 800, alors que P est le seul témoin précarolingien de la Passion. Les archaïsmes codicologiques montrent que ce témoin est issu d'un centre encore en pleine possession des traditions antiques du codex, comme pouvait l'être le scriptorium de Lyon à l'époque de la correspondance échangée entre Grégoire le Grand et l'évêque Aetherius. De plus, les deux dossiers, herméneutique et hagiographique, sont établis selon la même méthode, savoir un écrit de l'évêque de Lyon, accompagné de pièces annexes empruntées à la correspondance privée de l'auteur et reproduisant chacune à sa façon, dans la mise en forme du post-scriptum, un trait spécifique de la lettre dans l'Antiquité. Dans le texte des traités, certaines abréviations non comprises par le copiste paraissent relever d' un antigraphe en cursive. Autant de gages de proximité de la source et d'authenticité pour les pièces constituant l'un et l'autre dossier. Le ms a été très tôt à Saint-Oyend, d'où semble l'avoir fait revenir à Lyon dans le premier quart du IXe siècle l'évêque Leidrad pour appuyer sur les traités herméneutiques de son lointain prédécesseur la formation des clercs à l'interprétation de l'Ecriture Sainte. Florus l'a eu entre les mains plusieurs fois dans sa vie et en a sélectionné de nombreux passages. Il a préparé en vue de copie l'intégralité du texte de la Passion, et est repassé sur certaines lignes à demi effacées, signe d'une utilisation intensive des folios contenant ce texte, peut-être dans un cadre liturgique. C'est Mannon qui a rendu le ms à Saint-Oyend à la fin du IXe s., où l'a redécouvert Chifflet au XVIIe siècle. Cette étude, actuellement sous presse, dont la primeur est donnée à la table ronde de Besançon, paraîtra début 2008 accompagnée d'un examen détaillé des preuves et arguments à l'appui, dans la Revue d'Histoire des textes (éditions Brepols) tome 3 de la nouvelle série.

Louis Holtz
40, rue Lucien-Sampaix
75010 Paris
louis.holtz@wanadoo.fr