TIROIR 17 PAQUET 1

Nottes des titres et papiers concernants les droits et prétentions de l'Abbaye contre la bourgeoisie de Saint-Maurice et les accords, procès et difficultés survenues à ce sujet entre elles

Quoique Saint-Maurice, soit Agaune, ne se trouve pas expressément énoncé dans la charte de saint Sigismond entre les terres et possessions que ce roi a donné à l'Abbaye, on ne peut guère douter cependant qu'il n'y fût compris avec son territoire. Seroit-il en effet raisonable de croire qu'après lui avoir assuré la possession de tant d'endroits, bourgs et villages voisins et même si éloignés, il lui eût refusé le terrein qui étoit le plus à sa bienséance, où il établissoit un si grand nombre de religieux et qu'il regardoit comme consacré par le sang des glorieux martyrs, à la gloire desquels il élevoit un tel monument de sa religion? Certainement si ce prince ne le lui a pas donné, c'est une marque qu'il lui appartenoit déjà.
Il paroît au moins évident que les souverains pontifs qui ont confirmé la grande donation de saint Sigismond et surtout Eugène 1er [Eugène I] et Alexandre 4 [Alexandre IV] l'ont ainsi entendu quand aux dîmes particulièrement, comme on peut le voir dans leurs bulles.

Voir aussi Privilèges des papes N° 1 [2/1/1], 16 [2/1/16] etc.

Ce qu'il y a de bien certain est que Rodolp 3 [Rodolphe III], roi de Bourgogne, second restaurateur de l'Abbaye, entre autres choses, qu'il lui a rendu des donations à elle faites par ses prédécesseurs, lui a restitué la moitié du bourg de Saint-Maurice, le four avec les moulins, les deux tiers de la gabelle du sel avec les alpes dudit lieu et toute la tête du lac.

Voir aussi:
Sa charte de l'an 1014 ou 1017 [1/1/6] etc.
Liber Agaunensis, fol. 55

Malgré ces titres primordiaux et l'intérêt que la bourgeoisie auroit dû prendre en tout tems de veiller elle-même à la conservation d'une Abbaye qui fait toute sa gloire, il n'est pas concevable combien d'efforts elle a fait et combien de procès elle lui a suscité presque en chaque siècle pour anéantir ou au moins lui enlever presque tous ses droits. On en va faire le détail en commençant par les droits de dîmes que MM. les bourgeois ont attaqué les premiers et avec le plus d'acharnement depuis environ cinq siècles.
Pour mieux éclaircir la matière des dîmes, on examinera à part les questions suivantes:
1° L'Abbaye a-t-elle jamais eu la généralité de dîme depuis le vieux cours du torrent de la Marre jusqu'au fond de la parroisse au bas du château?
2° Est-elle encore en possession de cette généralité depuis ledit vieux cours du torrent de la Marre ou de Saint-Barthélemi jusqu'au vieux cours du Torrent de Vérolliey [Vérolliez]? On parlera en cette question du dîme de Beraussa [Vérossaz];
3° La même généralité subsiste-t-elle encore depuis ledit vieux cours du torrent de Vérolliey jusqu'au château même quand au dîme du foin, chanvre etc.?;
4° Qu'elle a été et qu'elle est aujourd'hui la quotte du dîme du vin?
5° Ce dîme doit-il se payer sur les vignes ou dans les caves?

<page 308>


Généralité de dîme depuis le vieux torrent de la Marre jusqu'au-dessous du château

La généralité de ce dîme sur les champs, prés, vignes, chenevières de tout tems cultivés étoit anciennement trop bien fondée sur l'usage et sur la fondation de saint Sigismond et des bulles des papes qui l'ont confirmé pour que MM. de Saint-Maurice osassent l'attaquer de front; aussi ne l'ont-ils jamais fait, au moins ouvertement, jusqu'il y a une vingtaine. d'années, encore n'a-ce été, pour ainsi dire, que par menaces, comme on le verra cy-après. Mais ily a environ 500 ans au moins que toutes leus démarches tendent là insensiblement.

17/1/1
Généralité de dîmes rière Saint-Maurice
Original
1280

S'étant élevé diverses difficultés entre l'Abbaye et la bourgeoisie au sujet des esserts faits et à faire dès le vieux torrent de la Marre ou du Bois-Noir, en bas, aussi loin que s'étend la paroisse de Saint-Maurice, la cause fut longtems agitée devant le juge du prince qui, ayant exhorté les parties à s'en remettre au jugement de quelques arbitres, elles y consentirent et firent un compromis auquel elles s'obligèrent au mois de janvier de cette année.

1 document coté :
CHA 17/1/1

 

17/1/2
Généralité de dime rière Saint-Maurice
1280 Original

Le susdit compromis s'effectua dès le mois de frévrier même année, et voici en substance le jugement que portèrent les arbitres:
1° Ils adjugèrent à l'Abbaye les dîmes et les nones sur tous les esserts qui se défrichoient tant deçà que delà le Rhône depuis le torrent de la Marre et l'eau qui descend de Morcles en bas [D'une autre main: ex utraque parte Rodani prout protenditur a veteri torrente de Matre et ab aqua descendente de Morcles] jusqu'au fond de la paroisse, avec le pouvoir d'accenser lesdits pâturages, et aux bourgeois le droit de paquerer et d'esserter dans les mêmes pâturages, le tout selon les possesssions imémoriales des chaque partie, en sorte, disent les arbitres, que l'Abbaye a le vrai domaine de ces pâturages, et les bourgeois la faculté d'en user en payant à l'Abbaye les nones et décimes. Mais comme plusieurs bourgeois s'étoient mis sur le pied de s'approprier sans permission de l'Abbaye des parties de ces esserts et pâturages même rière Lavey et les isles,
2° Les arbitres attribuent à la seule Abbaye et au cause-ayants d'elle le droit de pâturage dans le plan de Lavey et le plan des isles, limitées dans l'acte, sans cependant pouvoir fermer et abberger dans ce terrain sinon pour le terme, depuis la Saint-Jean Baptiste jusqu'à la nativité de la Vierge;
3° Ils règlent que les surfaces des trois isles de Saint-Maurice et Vernery de bibitorio, depuis longtems banisées, soient vendues, et que le prix en soit employé pour l'utilité publique de l'église et du bourg de Saint-Maurice et qu'ensuitte, lesdites isles ne se banissent plus, mais soient ouvertes pour les paquerages;
4° Ils accordent que dans tous les autres lieux, ceux de Saint-Maurice, de Lavey et d'Epinassey pourront esserter et faire des améliorations à leur volonté, avec la permission cependant de l'Abbaye, en lui payant les nones et decimes des esserts ou le service annuel convenu.

Original avec une copie légale et 2 simples.

N. B. Il est vrai que dans cet acte, il n'est fait mention que du droit des nones et décimes sur les esserts de bien communs, mais il est bien clair que ce droit suppose la généralité de dîme rière tout le terrain de Saint-Maurice et Lavey dans les mêmes limites; l'église de l'Abbbaye surtout étant la mère église dans tous ces endroits, à qui par conséquent appartenoit de droit toute le dîme, à moins qu'on ne prouve le contraire. C'est ainsi que l'a entendu M. Augspourguer, gouverneur d'Aigle, dans la sentence de 1747 touchant les [...] dîmes delà la pont, N° 35 [texte effacé].

Voir aussi:
Liber Sancti Mauricii [Liber Agaunensis], fol. 13v
Charléty, p. 217

4 documents cotés :
CHA 17/1/2~01
CHA 17/1/2~02
CHA 17/1/2~03
CHA 17/1/2~04

 

<page 309>

17/1/3
Généralité de dîmes rière Saint-Maurice
1416 etc.
Original

On conserve de vieux cottets des années 1416 jusqu'en l'anée 1425 par lesquels on voit que l'Abbaye cueilloit le dîme du vin dans la paroisse de Saint-Maurice tant delà que deçà le Rhône et nommément aux plantées et juqu'à la quantitié quelques fois de près de 200 sextiers, ce qui prouve bien que ce dîme s'étendoit généralement sur tous les distris de vignes et à une quotte assés haute.

1571, 1579 etc.

On joint aussi sous ce nombre d'autres vieux cottets, où l'on voit que l'on payoit le dîme des vignes, même des premières, de Vérolliey [Vérolliez], de Chabloz,etc.

3 documents cotés :
CHA 17/1/3~01
CHA 17/1/3~02
CHA 17/1/3~03

 

17/1/4
Généralitàé de dîme rière Saint-Maurice
Original et copie
1449

Les difficultés recomencèrent en cette année entre l'Abbaye et la bourgeoisie au sujet des esserts faits sur les communs et de la montagne d'Auzonnaz. L'Abbaye prétendoit les nones et décimes sur lesdits esserts, à teneur du susdit acte de 1280, et le droit d'alpeage pour elle, avec une cense feudale pour l'hôpital sur ladite montagne, et les bourgeois se croyoient exempts de tout cela, en vertu d'un prétendu possessoir imménorial. Enfin, on en vint à un accord, en vertu duquel les bourgeois se soumirent:
1° A payer au lieu desdites nones et décimes la 16e partie des fruits du foin, blé, chanvre,vin et seigle, crus et à croître sur lesdits esserts faits ou faire;
2° A payer 8 sous à l'Abbaye de rente annuelle pour cause d'alpeage pour la montagne d'Auzonna et ses dépendences, y compris les lieux du Jorat et du Cucurier;
3° De payer annuellement à l'hôpital 2 sous et 3 deniers pour tous ses droits sur ladite montagne;
4° Il a été arrêté entre les deux parties que lorsque l'Abbaye voudra conduire son bétail en Salance [Salanfe], elle sera en droit de faire paître son dit bétail en passant, soit pour aller, soit pour revenir, en ladite montagne d'Auzonnaz et appartenances, savoir au Jorat et au Cucurier.

Voir aussi:
Infra, p. 28 [18/1/2]
Liber Agaunensis, fol. 39

3 documents cotés :
CHA 17/1/4~01
CHA 17/1/4~02
CHA 17/1/4~03

 

17/1/5
Généralité de dîme rière Saint-Maurice
Original
1621

Miche Depraz, au nom de sa femme, refusant en cette année de payer le dîme à l'Abbaye d'un verger converti en chenevière et jardin sous le bourg, il s'éleva là-dessus un procès entre eux, où la bourgeoisie prit enfin part, qui fut longtems agité devant le gouverneur ou son lieutenant et porté enfin devant le tribunal de Monseigneur l'évêque. On voit dans la procédure qui nous en reste plusieurs preuves de la généralité de la dîme de l'abbaye:
1° Page 2e: les procureurs de l'Abbaye se fondoient sur son possessoir de percevoir de tout tems le dîme du blé, du vin, du foin et du chanvre dans tout le territoire de Saint-Maurice, tant rière l'enceinte des murs que dehors, possessoir que les sindics de Saint-Maurice n'ont jamais absolument nié, mais seulement tenté de rendre un peu équivoque quand à ce qui est dans l'enceinte des murs, en attribuant les payemens qu'on en avoit fait à un pur motif de dévotion. Voyés leurs réponses vers la fin de cette procédure;
2° Lesdits procureurs de l'Abbaye, page 17e, après d'autres preuves du droit de généralité de dîme, rapportent et citent un examen juridique fait à Saint-Maurice en 1505,le 25 janvier, signé Jean de Prato notaire, où <page 310> neuf témoins bourgeois, tant ecclésiastiques que séculiers, après avoir donné pour confins de la paroisse de Saint-Maurice, celles de Salvan, de Massonger [Massongex] et de Bex, et déclaré que l'église de l'Abbaye est proprement l'église parroissiale, la mère église et baptismale dans tout ce district, et que les deux chappelles de Notre-Dame sous le Bourg, et de Saint-Sigismond sont dépendentes et sujettes de ladite église collégiale, et qu'on y célèbre les divins offices, mais sans étendard et sans fonds batismaux, voici ce qu'ajoutent lesdits témoins:
Infra quos confines retrofluxis temporibus reverendi domini abbates et monasterium Sancti Mauritii Agaunensis semper soliti fuerunt, tam de jure communi quam divino, levare et percipere ac exigere decimas bladorum, canapum, fœnorum, herbarum, pratorum ac nascentium animalium, et quod omnes possessiones tenentur ad decimam, nisi de contrario edoceatur.
Cette procédure est originale et signée, et MM. les sindics de Saint-Maurice n'ont rien opposé dans leurs réponses à la vérité du susdit examen; ils ont seulement tâché de le restraindre, contre ses propres termes, au terrein qui est hors des murs de Saint Maurice.On verra cy-après coment ce procès a fini en 1627

[D'une autre main, en marge]: L'église de l'Abbaye est la seule église paroissiale et baptismale.

Voir aussi Dîme deçà Verolliey [Vérolliez], N° 9 [17/3/9]

1 document coté :
CHA 17/1/5

A ces titre généraux pour prouver la généralité de dîme en faveur de l'abbaye, on en ajoutera grand nombre de particuliers dans les articles suivants; on verra surtout cy-après, lorsqu'on exposera de suite les procès qui ont été agités entre l'abbaye et la bourgeoisie vers la fin du siècle passé et pendant celu-ci, que MM. les bourgeois n'ont jamais attaqué ladite généralité de dîme jusqu'à l'anée 1695.

Dîme des naissants

1318

L'Abbaye abberge à Jean de Véraussa et ses propres enfans légitimes son dîme des naissants rière tout le territoire d'Alesses [Alesse], de Mex, d'Epinassey, de Saint-Maurice, de Véraussa [Vérossaz] de sa parroisse de Saint-Maurice, sa portion de dîme des naissants rière Daviaz, parroisse de Massonger [Massongex], item toute le dîme des naissants rière les Epeny, parroisse de Choez [Choëx] et dans tout le territoire de Lavey, parroisse Sous-le-Bourg pour 15 sous mauriçois de rente annuelle.

Voir aussi:
Minutes sous l'abbé Barthélemi, fol. 15v
Charléty, Liber III, p. 161

1505

Vide supra, N° 5 [17/1/5].

 

17/1/6
Généralité de dîme rière Saint-Maurice
Copie 1551

Copie de la reconoissance du susdit dîme des naissants, savoir de ce dîme en entier rière Allesses [Alesse], Mez [Mex] et Epinassey, des 3/4 rière Saint-Maurice et Véraussa [Vérossaz], du 1/4 rière Daviaz et du tout rière Choez [Choëx] et Lavey sous 16 sous de cense, prêtée par Jean Boquis de Vouvri [Vouvry] et par les enfans de François Charvy.

1 document coté :
CHA 17/1/6