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Extrait d’un procès
en sorcellerie
(1 juillet 1457)
(AASM PRV JUS/30/2, f. 11r-v)
Traduction
par Christine Payot
et par Myriam Friederich
Troisième monition faite charitablement à ladite
Agnès, avec la confession faite par elle
Même année et même jour que précédemment,
à l'heure des vêpres, en vertu de l’assignation
décrite plus haut, ledit seigneur inquisiteur alla pour la
seconde fois de la journée trouver la susnommée Agnès,
femme de Jean Crittin, sortie à ce moment-là des geôles.
Il lui demanda si elle avait réfléchi aux monitions
faites à elle par ledit seigneur inquisiteur, ce qu’elle
avouait à son sujet et tout ce qu’elle savait d’autre
à propos dudit crime d'hérésie, en promettant
à ladite Agnès, si elle se confessait d’elle-même,
de lui accorder grâce. Laquelle Agnès répondit
qu'il y a environ vingt-deux ans, l’un des fils de ladite
Agnès était décédé de la petite
vérole et peu après, un jour, à la nuit tombante,
celle qui parle, désespérée, alla vers le torrent
de Saxi Reye où elle découvrit un homme noir, ayant
des mains noires et de grands ongles. Cet homme lui dit : «
Qu'est-ce que tu as ? Tu pleures ? » Elle répondit
: « Je suis en colère à cause de la mort de
mon fils ». Lequel homme répondit : « Tu n’aurais
pas de soucis à te faire si tu te conformais à mes
volontés, je te donnerai assez en échange »
. Laquelle Agnès lui répondit : « Que veux-tu
que je fasse ? » Lequel homme répondit : « Que
tu me donnes un cheveu de ta tête ». Laquelle Agnès
accepta de le lui donner et cet homme prit ledit cheveu; en le prenant,
il fit très mal à ladite Agnès, à la
tête. Et ensuite, il dit à elle, Agnès : «
Viens avec moi ! ». Elle alla avec lui jusqu'à un lieu
appelé Pierraz [fol. 6v] Grossaz, de la paroisse de Bagnes,
où elle trouva beaucoup de gens, hommes et femmes, qu'elle
ne connaissait pas et cet homme noir agitait une torche diffusant
une lumière ténébreuse. Là, ils mangèrent
du pain et des plats de viande et puis ledit homme noir éteignit
la torche ; celle-ci éteinte, ils se sont retirés,
chacun de leur côté.
Interrogée à propos de ce qu’ensuite ledit
homme noir fit arriver à elle, elle dit qu'il ne fit rien.
Interrogée au sujet de ce qu’ils firent ensuite là,
en ce lieu, ladite torche une fois éteinte, elle dit qu'ils
ne firent rien.
Interrogée pour savoir si elle voulait se confesser plus
amplement à propos dudit crime d'hérésie, elle
dit que non, parce qu'elle ne sait rien d'autre.
À ce sujet, pour la troisième et dernière
monition gracieuse, ledit seigneur inquisiteur prévint ladite
Agnès du fait que, si elle voulait confesser ledit crime
d'hérésie spontanément, il lui promettait de
lui accorder grâce, en fixant à ladite Agnès
le deuxième jour de ce même mois de juillet –
lendemain de sa dite troisième monition gracieuse, à
la première heure - comme délai pour avouer et dire
toute la vérité au sujet du susdit crime d’hérésie
pour lequel elle est détenue – tant à son propre
sujet qu’à celui de ses autres complices – et
pour répondre alors à un certain nombre d’articles
que ledit procureur devrait remettre alors contre ladite Agnès.
À propos de toutes les choses prédites, le susdit
seigneur, frère Pierre de Pascua, procureur de la foi, demanda
que fût fait pour lui un instrument public par moi, le notaire
souscrit. Fait à Bagnes, dans la salle de la maison de la
Cour dudit monastère, en présence du vénérable
dom Guillaume (Guillelmus) Bernardi, curé d'Ollon, des nobles
Pierre de Lugrin (Petrus de Lugrino), Antoine (Anthonius) de Castellario
et de Guillaume (Guillelmus) Fareti, notaire, témoins convoqués
et requis en vue des choses susmentionnées. Daté comme
ci-dessus.
[Paraphe] Guillaume Bagniodi.
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